Comment
réaliser la suite d'un film qui se termine par la fin de tout ? Voilà
l'épineux problème auquel Takashi Miike a été confronté
lorsque les producteurs de DOA - Hanzaisya demandèrent au réalisateur
de faire une suite. Voilà le paradoxe Miike dans toute sa splendeur
Avec DOA2 - Tobosha, Miike accepte de rentrer dans le jeu mercantile des
suites, tout en livrant son film le plus personnel, le meilleur épisode
de la trilogie, sans doute son meilleur film, et un film essentiel
tout
simplement. Takashi Miike brise ainsi tous les liens de paternité entre
le premier épisode et le deuxième tout en profitant d'une relation
déjà établie entre les deux acteurs principaux (Shu Aikawa
et Riki Takeuchi) et l'inconscient collectif des spectateurs du premier DOA.
S'ensuit une narration totalement décomplexée et débarrassée
de cette gênante mise en place traditionnelle en longues séquences
d'exposition
On reprend les mêmes, on change tout et on recommence
Alors
qu'il s'apprête à assassiner un chef yakuza pour honorer un contrat
et semer la débâcle au sein des clans locaux, Okamoto se fait devancer
par un autre tueur beaucoup plus expéditif... Il empoche tout de même
la somme qui lui était promise avant de s'enfuir en vitesse et de retourner
sur son île natale pour se faire oublier. Là-bas, il tombe sur
le mystérieux meurtrier. Un homme qu'il connaît en fait très
bien, vu qu'il s'agit de son ami d'enfance, Sawada. Les deux hommes se replongent
alors dans leur passé avec nostalgie et s'attardent sur ces moments de
leur enfance qui ont conditionné leur âge adulte. Toujours recherchés
par les yakuzas et les triades, Okamoto et Sawada décident alors de former
un duo de tueurs à gage en modifiant un tant soit peu les règles
du jeu
Avec DOA2
- Tobosha, Miike laisse de côté l'univers bien ancré dans
le réel et la mise en image de furieux du premier épisode pour filmer
cette fois-ci le cheminement de ces deux anges de la mort complémentaires,
de ce yin et de ce yang à travers une narration calme, reposée et
une mise en images onirique, comme dans un rêve ou dans un souvenir nostalgique.
A bien des égards, l'univers décrit dans DOA2 - Tobosha pourra
vous rappeler Sonatine de Takeshi Kitano avec ces adultes qui retombent
en enfance avant de reprendre leur route, à la différence que ceux
de Kitano se dirigent vers la mort la tête basse, le dos voûté
sous le poids des remords et que ceux de Miike affrontent la mort en étant
transformés par le souvenir de leur passé, par cette enfance qui
a conditionné ce qu'ils sont aujourd'hui. Bien
sûr on reste dans l'univers totalement barré du réalisateur
nippon fou avec ce que cela comprend en implosions, explosions et écoulements
de fluides divers
mais cette fois-ci la violence est complètement
désamorcée grâce à un humour purement visuel et surréaliste...
on notera les moments déjà cultes de l'assassinat d'un nain en 3D
par des yakuzas adeptes des SMS ou la scène du deuil d'une femme pour le
membre de son mari assassiné... membre mesurant 1 mètre de long
et habilement dissimulé à nos yeux innocents par une mosaïque
numérique... On remarquera forcément au casting la présence
inoubliable de Shinya Tsukamoto (réalisateur des Tetsuo et toujours
acteur un an plus tard dans l'inénarrable Ichi
The Killer du même Miike) en yakuza magicien dont la scène
d'introduction où il narre le combat fratricide des triades à l'aide
de paquets de cigarettes est à tuer son voisin de siège de rire
!!!! (mode dithyrambique activé !!!).
Comment ne pas mentionner
également la musique du compositeur Chu Ishikawa qui accompagne de façon
merveilleuse et par petites touches subtiles les images de Miike et qui pourrait
même vous arracher quelques larmes à la fin du métrage...
Pleurer dans un film de Takashi Miike ?! Oui, c'est l'exploit de DOA2
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